Le livre Dix questions sur l'antispécisme est disponible depuis mai 2021 en librairie ou en ligne, de préférence sur le réseau des libraires indépendants (ici ou , ou encore ici en Belgique).
Il est publié chez Libertalia qui tient cette page sur ce livre.

Recensions :
- Matthieu Giroux, "Antispécisme versus spécistes : la bataille des idées est relancée", Usbek & Rica, 9 juillet 2021
- Ahmed Slama, "L’ANTISPÉCISME, UNE LUTTE ÉMANCIPATRICE", Littéralutte, 15 juin 2021
- Charlotte Cottrez, Virage, août 2021, p. 34


  Compte-rendu d'Irène Courtin (cf. aussi ci-dessous au cas où Instagram n'est pas facilement accessible)

Irène Courtin : Reçu il y a quelques jours, lu ce matin, le livre d'introduction à l'antispécisme de @jeromesegal aux @editionslibertalia (il est aussi l'auteur de Animal radical, vous trouverez un post dessus en remontant un peu ce fil). Vous remarquez qu'on reste dans les tons roses ces derniers temps ? Bien que la précédente photo était au mieux mauve, ça va, j'ai compris...
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Alors ce livre que vaut-il ? Et bien c'est une excellente introduction, accessible et très complète qui vous offrira un premier panorama des enjeux de l'antispécisme. De nombreux autres ouvrages et articles sont cités, c'est donc un format idéal pour ensuite creuser dans une ou plusieurs autres directions. C'est une lecture qui prend aussi parfaitement la suite de Cause animale luttes sociales chez @lepassagerclandestin.editions , mais dans l'autre sens ça marchera très bien aussi, puisque plusieurs chapitres de ce livre là citent des textes contenus dans Cause animale luttes sociales. J'ai apprécié aussi que 10 questions sur l'antispécisme cite pas mal de travaux d'autrices notamment francophones.
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Les 10 parties explorent la définition de l'antispécisme, les liens avec le socialisme et l'anarchisme, avec le féminisme, l'anti capitalisme, l'écologisme, les religions, le véganisme. Les derniers chapitres se penche sur l'antispécisme et la convergence des luttes, les rapports complexes à l'humanisme et enfin sur la question du projet de société porté par l'antispécisme. Cela couvre une grande partie des questions qu'on peut se poser, qui sont traitées avec nuance en montrant toujours la complexité et les dynamiques historiques.
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Je suis globalement très convaincue par ce travail de synthèse, dans un style d'écriture accessible tout en étant solidement documenté (comme je l'avais été pour Animal radical). J'aurais juste une réserve sur le chapitre 8 sur la convergence des luttes : Il me semble en effet que les critiques faites au mouvement antispécistes par des militant•es féministes et antiracistes dans une perspective intersectionnelle sont traitées rapidement et assez indirectement, et principalement par le biais des réponses qui leur sont faites dans le monde francophone par des antispécistes avec une bonne audience dans le mouvement animaliste. Ça me laisse le sentiment que les critiques féministes et antiracistes (qui par ex s''indignent des comparaisons utilisées avec les violences faites aux femmes ou encore l'esclavage) sont un peu réduites à un biais spéciste, humainement compréhensible mais rationnellement pas tenable. Pourtant si ces critiques sont aussi tenues à l'intérieur de la cause animale par des personnes qui se considèrent aussi antispécistes, cela vaudrait la peine de les examiner davantage et de regarder quelles positions sont proposées pour défendre à la fois une position antispéciste et intersectionnelle, qui analyse de pair ces oppressions tout en refusant certaines rhétoriques. Or ici, il n'y a pas de relais de ces critiques, qui concernent notamment les rapports de pouvoir à l'intérieur de la cause animale : surreprésentation des hommes blancs dans les théoriciens et auteurs reconnus (alors même que les militant•es sont largement des femmes), dérives de certaines asso ou tolérance envers des comportements racistes ou sexistes... Qu'on les considère entièrement fondées ou pas d'ailleurs. À cet égard je ne partage pas vraiment le choix de dédier une sous partie à une unique tribune sur la culture de l'ostracisme, parue dans l'Amorce, et qui représente un point de vue entendable mais dont on ne sait pas du tout ce qu'il représente à l'échelle du mouvement antispéciste. J'aurais aimé voir citées par exemple Ophélie Véron ou encore le blog Le cri du manioc (anciennement T punch intersectionnel), ou voire évoquées même rapidement les positions de féministes véganes noires (Sistah Vegan).
Voilà donc pour une critique qui ne retire pas le mérite du livre : j'ai eu parfois le sentiment que les approches antispécistes intersectionnelles étaient "validées" à partir du moment où il s'agit de militant•es exprimant le caractère indissociable de leur lutte et de l'antispécisme, mais que lorsque ces approches (même émanant de militant•es antispécistes) soulignent les rapports de pouvoir au sein de la cause animale et les implications de la position d'autorité intellectuelle de nombreux hommes blancs, elles sont un peu vite reliées à la "culture de l'ostracisme". Il n'était certes pas facile de tout couvrir et de tout nuancer, je conseille dans tous les cas la lecture de l'ouvrage qui balaie une belle diversité de thématiques et saura vous donner de solides points de repère